Gitans. Et à nouveau ma racine humaine
a tremblé. Ce sont eux qui me donnent toujours la
mesure absolue de la liberté que je n'ai pas et
à laquelle j'aspire. Anarchistes d'esprit et de corps,
ils sont les princes du rien, les millionnaires du
désintérêt, prêtres de la paresse, sabliers obstinés
où le temps ne s'écoule pas.
Ils mangent la pourriture, se vêtissent d'absurde,
ils sont des martiens sur terre. Et à les voir
cheminer dans la poussière du transitoire,
c'est l'image de l'homme idéal
que je vois passer, lyrique et dédaigneuse.

Miguel Torga, Diário Douro, 1954.